Disparition de Henri Corenthin : UN MALIEN DE QUALITÉ S’EN EST ALLÉ
Quand nous avions appris le décès à l’âge de 92 ans du Docteur Henri Corenthin, nous avons ressenti ce poignant regret que peut seul amener la disparition d’un homme de qualité.
D’un homme qui en outre n’a pas eu de son vivant tous les hommages dûs à ses mérites. Ce métis, Guadeloupéen d’origine, avait choisi par amour pour notre pays de lier intimement sa vie à celle du Soudan français au départ, puis à celle du Mali indépendant. Jeune docteur vétérinaire, il posa ses valises, au gré de l’affectation coloniale, à Kita au début des années 50. Dans la capitale arachidière du Soudan, il s’attela à promouvoir les activités sportives en accordant une attention toute particulière au football.
Il faut savoir que dans certaines colonies la pratique de ce sport a été longtemps réservée uniquement aux blancs et métis. La « libéralisation » de la discipline à la fin des années 30 permit aux Soudanais de s’y engouffrer avec enthousiasme. Henri Corenthin verra dans la promotion du ballon rond une manière de contribuer à la lutte émancipatrice du Soudan et il créa ainsi l’Union sportive de Kita. Après sa mutation à Bamako, il créa un autre club qu’avec son sens de l’humour, il baptisa l’USI (Union sportive indigène). Dont la fusion avec l’Aigle Noir de Bamako-coura, un adversaire pratiqué à Kita, donna naissance au Club olympique de Bamako. (COB).
Par delà le sport auquel le jeune Corenthin consacrait la majeure partie de son temps de loisirs, un événement politique majeur vint bouleverser l’administration des colonies françaises, le vote en 1956 de la Loi cadre par l’Assemblée nationale française. S’ouvrait ainsi un nouveau processus politique qui conduisit l’année suivante à l’intégration des cadres ressortissants des territoires dans la conduite de l’administration des colonies. Le premier gouvernement de la Loi cadre sera mis en place le 22 mai 1957 et Henri Corenthin y fit son entrée en qualité de ministre chargé de l’Elevage et de l’Industrie animale. Reconduit à cette responsabilité le 24 juillet 1958, il quitta le gouvernement le 4 avril 1959 à l’installation de celui de la Fédération du Mali (qui réunissait le Sénégal et le Soudan).
A l’éclatement de la Fédération et après la proclamation de l’Indépendance du Mali le 22 septembre 1960, Corenthin devint à 36 ans ministre des Travaux publics, des Transports et des Télécommunications. Un portefeuille qu’il conserva pendant deux ans avant de retrouver le gouvernement … six ans plus tard, le 22 novembre 1968. Le coup d’Etat militaire avait eu lieu trois jours auparavant.
Corenthin, qui avait abandonné sa nationalité française pour celle du Mali, se déclarait lui-même toujours « au service de son pays ». Il y resta dix mois. Le 19 septembre 1969, il sera remplacé par le capitaine Yoro Diakité vice-président du Comité militaire de libération nationale. La politique s’était détournée de Corenthin. Mais le sport ne s’était pas montré ingrat à son égard. Il s’y était épanoui totalement en qualité de président du COB, de président de la Ligue de football de Bamako et de membre de la Fédération malienne de football. Le tout entre 1962 à 1967.
Henri Corenthin eut aussi l’occasion, une fois installé, à Paris de réagir en Malien lorsqu’il vint assister Me Bertrand, l’avocat de Salif Kéïta dans le litige qui opposait en 1973 le premier Soulier d’or africain à son club, l’Association sportive de Saint Etienne.
De qualités de cœur, le Docteur n’en manquait pas et c’est cette générosité d’âme qu’il faut absolument rappeler maintenant qu’il a été porté en terre. De son épouse Monique Corenthin eut deux filles qui pleurent sans doute un père affectueux pendant qu’au Mali nous serons à jamais tristes du départ de l‘un des nôtres.
Que la terre te soit légère, Docteur.
M. DIARRA
SOURCES :
http://www.essor.ml/2016/04/disparition-de-henri-corenthin-un-malien-de-qualite-sen-est-alle/