Guadeloupe . La jeunesse, 1ère victime de la crise sociale

Guadeloupe . La jeunesse, 1ère victime de la crise sociale  

teddy bernadotte

Pointe-à-Pitre. Mercredi 21 avril 10. CCN Teddy Bernadotte, Dir cab, du Maire de Baie-Mahault est aussi le chef de projet des Etats Généraux de la Jeunesse, (EGJ )une importante manifestation, initiée par la municipalité pour tenter de cerner les problèmes récurrents de cette fraction de la population. Au cours de l’entretien, qu’il a accordé a CCN, Teddy Bernadotte s’est appliqué explique la philosophie de ces EGJ. qui débuteront avec le mois de mai.

CCN On se rappelle pendant  la gréve du LKP, l'intervention du maire de BM auprès de jeunes "délinquants"  qui s’apprêtaient à «  casser » une grande surface ces EGJ sont ils un prolongement de ce dialogue.

TB : Les EGJ émane de la volonté du Maire, qui a eu cette idée en travaillant lors de sa formation dans l’ingénierie sociale à l’INJEP (institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire). Ce n’est ni un début ni même un prolongement, c’est la continuité d’une politique mise en œuvre depuis 2001 par le Maire qui est aussi président du CISPD (conseil intercommunal de la sécurité et de la prévention de la délinquance). Issu du mouvement associatif et proche des jeunes, Ary Chalus a toujours eu à cœur de favoriser l’insertion des jeunes. D’ailleurs, l’une des premières mesures mises en œuvre par la ville fut le « TRACE », trajet d’accès à l’emploi. C’est d’ailleurs assez drôle car aujourd’hui, TRACE (la radio) est un de nos partenaires sur les EGJ. Au-delà de cette première mesure, bien d’autres ont vu le jour ; parmi les plus significatives, on peut citer la création des 3 entreprises d’insertion, les aides à la formation et les partenariats avec les entreprises qui recrutent des stagiaires, des contrats de professionnalisation ou des contrats à durée indéterminée. Mais l’engagement le plus symbolique fut l’intégration de tous les emplois aidés (300) alors même qu’ils ont été recrutés par la précédente équipe municipale. La Ville a gardé tous les emplois jeûnes ; soit plus de 300 emplois pérennisés. C’est la première mesure sociale en direction des jeunes. Ce qui nous a valu en 2007 un prix au niveau national, pour le management social (prix attribué par le groupe Moniteur).


CCN : Baie Mahault est devenue , un vrai "point chaud"  pour un certain nombre de gangs comment  la municipalité entend elle combattre  ce phénomène?

TB : Baie-Mahault attire : centre commerciaux, 5 lycées, vie nocturne, manifestations, concerts ! Mais c’est toute la conurbation urbaine qui est chaude. je participe aux réunions de coproduction de sécurité présidée par le sous-préfet et le procureur. On y trouve l’ensemble des services de sécurité (police, gendarmerie), le rectorat et les 4 villes de l’agglomération. Les chiffres sont éloquents et en constante augmentation (pas nécessairement sur Baie-Mahault). D’ailleurs aujourd’hui, on constate que le phénomène de violences s’étend hors agglo. Les derniers évènements en témoignent (Gourbeyre, Sainte-Rose, Capesterre). Ce sont des exemples, il ne s’agit pas de stigmatiser telle ou telle commune car l’ensemble du territoire guadeloupéen est touché par le phénomène de la violence. Baie-Mahault n’y échappe pas, nous ne sommes pas une « bulle ». Et, parce que nous ne pratiquons pas la politique de l’autruche, nous avons pris à bras le corps le problème ; 3 opérations de résorption d’habitat insalubre (Agathon, la Jaille et Fond A Roc). On poursuit l’amélioration de l’habitat et du cadre de vie dans certains quartiers sensibles, parc floral, foyers, cyber base. Le maire a suivi personnellement la réhabilitation du quartier de la Digue en relogeant la population. Un coin « difficile » qui sera une de nos plus belles entrées de ville avec aménagements des berges lacustres et cours de tennis. Dans les mesures d’insertion par l’emploi, nous avons ciblé certains quartiers dits difficiles. Il ne faut pas crier victoire mais depuis plusieurs mois, on constate une nette amélioration du climat social. Ces derniers temps, on a eu beaucoup de manifestations, de concerts pour les jeunes (Ex : Elephant man) qui se sont déroulés sans heurts.



CCN : Ces  EGJ sont un moment dans la  politique de  la ville, mais  qu'espérez vous à  la fin de cette manifestation?

TB : Recueillir les doléances des jeunes, les écouter et mettre en œuvre avec eux. Il ne s’agit pas de faire « pour », mais de faire « avec ». L’étape importante des EGJ sera le recueil et l’étude des questionnaires qui seront mis à disposition durant ces 3 mois. En ce qui me concerne, ce que j’espère c’est de ne plus entendre le sempiternel discours, « on ne fait rien pour les jeunes », « les élus ne pensent qu’à eux ». C’est la raison pour laquelle, nous avons été plus loin que ce qui se fait généralement dans l’hexagone. Ary Chalus nous a présenté l’enquête de terrain qu’il a réalisée sur la ville de Colombes lors de sa formation. Généralement les communes vont à la rencontre des jeunes et les écoutent. La ville de Baie-Mahault, pour être crédible et (re)donner confiance, parce que tous le monde parle de jeunes, mais et après ? Nous avons élaboré le guide de l’insertion de la formation et de l’emploi c’est d’une part, faire un bilan depuis 2001 des actions entreprises car elles sont nombreuses et d’autre part proposer 12 mesures concrètes qui commencent après les EGJ et financées sur notre Budget primitif 2010. Volonté politique mais traduction financière concrète, les mesures sont financées à 100% par la ville. A l’issue des EGJ, on aura certainement d’autres mesures et des propositions émanant des jeunes. On sollicitera des cofinancements aux assemblées locales et à l’Etat.

CCN : Votre Ville donne le signal de départ de   ces EGJ, mais ces problèmes concernent d'autres villes ou des problèmes similaires se posent faut il penser à des EGJ  pour toute la Guadeloupe, allez vous le proposer?


TB : Nous sommes une ville riche d’idées et de dynamisme et nous luttons contre les lieux communs qui consistent à penser que nous avons les moyens financiers, ni lagen ! La vérité c’est que nous nous donnons les moyens et que nous avons la chance d’avoir un Maire qui a une vision claire et précise du développement de sa cité. Pour vous prendre un exemple : l’opération des permis de conduire gratuits pour les jeunes demandeurs d’emplois, nous la pratiquons depuis 4 ans. Pendant les vacances scolaires, c’est une centaine d’étudiants qui perçoivent 1000 euros pour donner des cours de soutien scolaire et assurer des vacances gratuites (opération village vie vacances) à près de 800 jeunes. Nous avons lutté contre la « fracture numérique » en installant le premier Espace public numérique à Lacroix dès 2001. Ces mesures ne coutent pas chers et souvent elles sont cofinancées par l’Europe, l’Etat ou les collectivités locales. Autre exemple : les chantiers d’insertion (PAIE 2002) que nous menons le long du littoral. Par ce biais des cofinancements, la ville apporte 20% du montant total des investissements. Comme le demande Ary Chalus, on réfléchit et on travaille dans l’intérêt de la population ; on ne cherche pas à s’ériger en exemple. Mais si une collectivité veut faire une expérience similaire, nous demeurons à sa disposition. Dans cet esprit, car c’est un problème guadeloupéen, et non pas Baie-Mahaultien. J’ai proposé au chef de projet (M. René) du CUCS (contrat urbain de cohésion sociale) qui regroupe les 4 communes de l’agglomération de voir dans quelle mesure l’on pourrait élargir notre action communale à l’ensemble de l’agglomération, mais ce n’est qu’une proposition ! C’est aussi une vision que le Maire partage avec le procureur de la République (Jean-Michel Prêtre) au sein du CISPD, en développant d’autres actions. Cela pour une raison simple : régler notre « problème » sans tenir compte du contexte local, revient à rejouer le « mythe de Sisyphe ». Ce serait une sorte de victoire à la Pyrrhus.

CCN . comment les jeunes en général et ceux qui sont marginaux ont ils accueillis cette initiative?


TB : L’accueil des EGJ est excellent parce qu’ils ont l’habitude de nous voir sur le terrain. On se rencontre souvent. Hier, on était en train de remettre des questionnaires EGJ et des guides de l’insertion, tout en distribuant des tickets de concerts de Diams dans des quartiers sensibles. Chaque année on réalise le carrefour de l’emploi, les journées de l’insertion. La mairie annexe de Jarry organise les rendez-vous économiques pour les porteurs de projets…. Nous ne faisons pas un « coup », et cela ils le savent. Les EGJ ne sont qu’une « modélisation » de notre politique en faveur de la jeunesse. Dans la com.’, nous avons introduit un élément original. Les jeunes qui font la com.’ sont des jeunes insérés par la ville, (F. THEOBALD, Livie PAOLA, Pairle URSULET, Victor BOGAT), soit la meilleure preuve de l’action entreprise par la ville, toujours pour rester dans un climat de confiance. Le message est clair ; si ils y arrivent vous aussi vous pouvez y arriver. Pas seulement par un recrutement ville mais dans une entreprise ou en créant votre emploi.

Le terme « jeunes » que l’on utilise aujourd’hui est erroné. Il faut que les mesures et le discours soit précis : jeunes chômeurs, jeunes étudiants, jeunes porteurs de projets, jeunes chefs d’entreprises, jeunes marginaux….Le terme JEUNES, est impropre ! Difficile de répondre à votre question parce que la ville organise ces EGJ. On l’organise, je ne vais pas vous dire, qu’ils l’accueillent mal !!!! Je vais juste vous dire qu’il est trop tôt pour répondre à cette question et tirer des conclusions. Rendez vous sur CCN dans trois mois !



Teddy Bernadotte
Directeur de Cabinet
Chef de projet des EGJ